Cinq cents ans de tradition impliquent que le poème du genre dhrupad se chante de multiples façons. Ces styles de chant assez éloignés les uns des autres ne conservent en commun que les élément primordiaux c'est-à-dire poétiques, et les ornements obligatoires du râg.
Selon leur famille d'origine, les musiciens emploient des développements
musicaux différents même s'ils sont tous liés aux mêmes règles musicales
du râg.
Le poème chanté se compose de quatre parties : sthâî, long couplet et
premier mouvement déployant le râg sur l'octave basse et la première moitié
de l'octave médium; antarâ, second couplet et second mouvement qui
correspond à une montée du registre vers le SA aigu ; âbhog, troisième couplet qui se développe sur les trois octaves et enfin le dernier mouvement, le
sancârî, qui est une improvisation sur les mots du poème faisant intervenir
la division du mètre poétique.
Les différentes composantes poétiques du dhrupad c'est à dire sthâî, antarâ, âbhog, décrivent non seulement les suites de brèves et de longues contenues dans les vers, mais aussi les directions des développements musicaux selon le râg, au travers du jeu des ornements musicaux, les âlankârs, formant un tissu inextricable de poésie et de musique.
Tout comme dans l'âlâp, dans le poème chanté la vitesse d'éxecution (lay) s'accroît progressivement tout au long des différents mouvements.
Le premier vers du sthâî (le mukhdâ) est chanté une, deux ou trois fois de suite au début du poème chanté, et à chacune de ses syllabes correspond une note ou un série de notes particulières selon le râga et la tradition du musicien. Ce vers est systématiquement repris à la fin de chaque couplet, c'est le mouvement-clef du râga : il est la trame mélodique de référence.
Pendant le chant du mukhdâ, le percussionniste qui accompagne le chanteur joue un thème rythmique régulier (thékâ) mais dès la récitation du deuxième vers du sthâî, il fait preuve d'indépendance rythmique, et utilise la très grande régularité de la diction du sthâî pour développer différentes improvisations rythmiques en bols (paran) qu'il est capable d'imaginer, modifiant aussi la cadence et la vitesse d'exécution (accélération subite 1:1 1/4, 1:5/6, 1:2, puis ralentissement, ou l'inverse).
Le chanteur, sortant de la trame musicale précise qu'il suivait auparavant,
se lance aussi dans une improvisation mélodique mais il respecte l'ordre
du poème.
La fin du deuxième vers du sthâî est marquée par le retour du percussionniste
au thème rythmique : c'est le signe du début de l'antarâ.
L'antarâ présente un développement musical vers l'aigu. Les vers sont
répétés, et à chaque fois leur note de départ est rehaussée.
Par exemple, le premier vers commencera avec un MA, le second vers ou la
répétition du premier vers commencera avec un SA etc...
Dans la plupart des écoles, le chanteur pendant l'antarâ décale progressivement le tâl du poème du tâl du percussionniste, divisant les mâtrâs de la fin du poème pour atterrir avec le percussionniste sur le sam.
Le traitement de l'âbhog varie trop d'un style de dhrupad à un autre pour être décrit en détail (il peut être absent ou longuement développé ou placé rapidement après l'antarâ). Long poème, il inclut fréquemment, lorqu'il est développé, un retour au mukdhâ.
Quant au sancârî, cette dernière partie semble avoir été ajoutée au XIXème siècle pour une raison simple : l'âbhog est un vers composé d'une très longue série de mâtrâs, qui a été coupée en deux parties. Cette proximité fait que de nombreux chanteurs continuent à traiter âbhog et sancârî en un seul mouvement où le sancârî peut être en premier. Âbhog et sancârî ont d'ailleurs en commun de s'étendre sur les trois gammes.
Le sancârî donne lieu, dans certains styles (la famille Mallik est un bon exemple) à une improvisation sur les mètres poétiques où le chanteur doit multiplier le nombre de syllabes contenues dans une unité de temps constante (bol banav).
Cette multiplication entraînant une diction plus rapide, le chanteur doit trouver des mots du poème dont les syllabes peuvent remplir l'unité de temps (le temps du percussioniste), le tout sans faute de sens.
Mais certains poèmes du dhrupad ont été conçus sans âbhog ni sancârî et ne comprennent que sthâî et antarâ : cette forme abrégée se retrouve dans de nombreux genres, et elle est significative d'une évolution de la poétique, et par là même de la musique de l'Inde du Nord.